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Comptabilité et Conseils Fiscaux pour PME

CONSEILS FISCAUX

La Belgique taxe-t-elle beaucoup trop ?

« La Belgique taxe taxe déjà tout en Belgique mais la piste qu’on n’explore jamais est celle d’une véritable réduction des dépenses »

« En taxant très fort le travail, on empêche beaucoup de gens de devenir riches. »

Thierry Afschrift est avocat-fiscaliste. Il livre sa vision sans concession du modèle fiscal belge. Le spécialiste estime que les ponctions des pouvoirs publics belges sont notoirement trop importantes. Un vrai débat sur les dépenses de l’Etat est éludé, selon lui.

La Belgique taxe-t-elle beaucoup trop?

C’est incontestable. Les statistiques sont claires. Depuis 10 ans, la Belgique est systématiquement dans les trois premiers Etats les plus taxateurs au monde. Nous sommes dans le même lot que le Danemark ou la Suède.

C’est un handicap ?

C’en est un pour le contribuable belge. Il a l’impression d’avoir un « return » insuffisant par rapport à ce qu’il paye. Les prestations sociales sont, par exemple, meilleures dans un pays comme la Suisse. C’est aussi un handicap pour les investissements étrangers et pour le dynamisme de l’économie. Des impôts aussi importants sont un frein à la création d’entreprises. Les études montrent que les jeunes ont moins envie de créer une entreprise que partout ailleurs. Ils ont souvent envie d’être fonctionnaire Mais si tout le monde est fonctionnaire, le pays ne peut pas marcher (rires).

La Belgique est-elle un paradis fiscal pour les riches ?

En taxant très fort le travail, on empêche beaucoup de gens de devenir riches. Il est très difficile de devenir riche pour quelqu’un qui n’a que son travail. Par contre, on favorise les richesses acquises qui, à condition de ne pas mourir, peuvent être taxées de façon moins lourde. Depuis que le précompte mobilier est à 25 %, la Belgique est toutefois dans la moyenne européenne. Par contre, en matière de plus-values, on est dans les pays les plus avantageux. J’ajoute que nous avons le taux d’impôt des sociétés parmi les plus élevés d’Europe. A mon sens, les intérêts notionnels étaient une erreur : il fallait réduire l’impôt des sociétés comme les autres pays. Les notionnels favorisent les très grandes entreprises qui ne font rien en Belgique, alors que le boucher du coin ne peut en bénéficier parce qu’il n’a pas beaucoup de capital. En somme, on réduit l’impôt sur ceux qui ont beaucoup de capital et pas sur ceux qui fournissent du travail. C’est injuste et contre-productif.

Une réforme fiscale est-elle nécessaire ?

Oui. Elle doit porter sur le niveau total des prélèvements, ce qui implique des choix politiques difficiles. Ensuite, sur la répartition des prélèvements qui est injuste car elle défavorise le travail. Les gains de la Loterie sont taxés à 0 % pour prendre un cas extrême. Il y a une discordance avec les revenus du travail et les autres revenus. Le système est très cynique : si la Belgique taxe beaucoup les revenus du travail, c’est parce qu’ils sont faciles à taxer et que la plupart des travailleurs n’ont aucune possibilité de délocalisation. Maintenant, gardons à l’esprit qu’il y a beaucoup plus de revenus professionnels que de revenus du capital. Pour réduire de 1 % la taxation du travail, il faudrait augmenter de 6 ou 7 % celle du capital.

Et un impôt sur la fortune ?

Si la fortune ne rapporte rien, il n’est pas logique de la taxer. Et c’est un impôt qui rapporte très peu. Si les taux sont prohibitifs, les gens partent ou fraudent, et si le taux est acceptable, le rendement justifie à peine les frais de recouvrement. Ça ne va pas sauver le budget de l’Etat. Pour sauver le budget de l’Etat, il faut s’attaquer aux dépenses qui pèsent aujourd’hui 57 % du PIB.

On ne parle jamais de la taxation sur certains revenus comme les loyers, qu’en pensez-vous ?

Ça obligerait une refonte profonde. Il faudrait revoir les revenus cadastraux, ce qui est un travail de titan. C’est vrai que les propriétaires ne sont taxés que sur le revenu cadastral, qui est inférieur au revenu réel, mais ils le sont deux fois : ils payent le précompte et l’impôt sur le revenu. Certes, cette double taxation est sans doute inférieure au loyer réel mais il faut admettre que, si la Belgique taxe le loyer réel, il faut aussi pouvoir déduire les frais réels.

Y a t-il des pistes qu’on n’explore jamais et qui mériteraient un peu d’attention ?

La piste qu’on n’explore jamais, c’est celle d’une véritable réduction des dépenses. On se concentre sur le gaspillage des pouvoirs publics mais on ne remet jamais en question le fait que l’Etat intervient dans des domaines qui représentent un coût qui ne se justifie plus aujourd’hui.

Par exemple ?

Nous avons des autoroutes qui ne sont pas dans un état brillant. Dans beaucoup de pays, elles sont vendues à des entreprises qui mettent des péages en place. Je trouverais assez normal que les gens qui utilisent souvent les autoroutes payent plus que ceux qui n’y vont que rarement.

Et au niveau des recettes ?

La Belgique taxe tout dans ce pays. Trouver autre chose, cela devient difficile.